Laurent BERGER annonce son départ Laurent Berger quitte ses fonctions : « Je ne suis pas indispensable à la CFDT » ( le Monde) Figure de la lutte contre la réforme des retraites, le secrétaire général du premier syndicat de France a annoncé, mercredi, qu’il laissera sa place le 21 juin à Marylise Léon, actuelle numéro deux de la confédération. Secrétaire général de la CFDT depuis novembre 2012, Laurent Berger a annoncé, mercredi 19 avril, au bureau national de son organisation qu’il cédera cette responsabilité le 21 juin prochain. Marylise Léon, actuellement numéro deux de la confédération, va lui succéder. Dans un entretien au Monde, il affirme que le syndicalisme sort « gagnant » du mouvement d’opposition à la réforme des retraites. Vous venez de dire à vos instances que vous allez quitter vos fonctions le 21 juin. Pourquoi le faire ainsi en plein conflit sur la réforme des retraites ? J’avais dit, lors de notre congrès en juin 2022, à Lyon, que je m’en irai en cours de mandat. Il s’agit d’une décision mûrement réfléchie, arrêtée dès la fin 2021, après discussion avec mes collègues de la commission exécutive. Ce n’est ni un coup de tête ni un choix dicté par l’actualité. Je souhaite tout simplement respecter des règles collectives et une forme d’éthique personnelle, liées au fonctionnement démocratique de la CFDT. Celle-ci n’est pas un parti, elle n’est pas non plus une entreprise personnelle : c’est une organisation collective. Il est normal qu’elle s’incarne dans des leaders, mais il est aussi normal qu’elle se renouvelle.J’occupe ce poste depuis dix ans et demi, soit une durée proche de celle des mandats de mes prédécesseurs, François Chérèque et Nicole Notat. Initialement, je songeais partir un tout petit peu plus tôt, en juin 2022, mais il aurait été compliqué de le faire à ce moment-là. Pourquoi avoir remis en cause le calendrier ? Nous venions de traverser l’épidémie de Covid-19, avec plusieurs chantiers qui n’avaient pas été menés à bien en interne. La période présentait de gros risques, sur le plan politique. Il fallait donc une CFDT qui puisse peser, sans avoir à gérer une phase de transition qui aurait pu s’accompagner de flottements. En outre, je suis président de la Confédération européenne des syndicats jusqu’au mois de mai et j’aurais dû abandonner cette responsabilité avant cette date si j’avais cédé la place de secrétaire général de la CFDT en juin 2022. Vous en allez-vous à cause d’une forme de lassitude ? Non. La fonction est, certes, exigeante, et j’ai beaucoup d’autres aspirations – par exemple consacrer plus de temps à ma famille, à mes amis. Mais je ne pars pas en ayant ras le bol de la CFDT. S’il y a bien une chose qui ne me fatigue pas, c’est la passion militante et celle que j’éprouve pour les militantes et les militantes de notre organisation syndicale. Que ressentez-vous, à deux mois du départ ? C’est une décision chargée d’émotion, bien sûr. Mais on ne vient pas là pour se servir. On vient là pour servir. J’ai toujours considéré que la responsabilité que j’ai endossée était merveilleuse, que c’était une forme de don qui m’avait été accordée avec la mission d’emmener la CFDT là où je pouvais. Comment la nouvelle sera-t-elle perçue en interne, selon vous ? Il faut que les militants comprennent une chose : on est de passage et il vaut mieux transmettre le témoin quand on est bien lancés. C’est le cas de la CFDT. Je suis ravi d’être dans un syndicat mature, alors que ça peut s’avérer plus compliqué dans d’autres organisations ou dans des partis politiques. Tout se passe sereinement, personne ne m’a demandé de partir. Qui va vous remplacer ? J’ai proposé au bureau national que ce soit Marylise Léon, qui est secrétaire générale adjointe depuis 2018. Elle est capable, avec l’équipe qui sera autour d’elle, d’impulser un nouvel élan, comme j’ai essayé de le faire, à partir de 2012 jusqu’à aujourd’hui. Elle est dynamique, elle a une compréhension du monde du travail qui est forte, parfois plus fine que la mienne – par exemple sur la question des nouvelles formes d’emplois. Elle s’est battue avec énergie lors des négociations sur l’assurance-chômage et elle est convaincue que la transition écologique doit s’effectuer de façon juste sur le plan social. Elle est appréciée au sein de la maison, elle est proche des gens, humaine. Comment la CFDT s’y est-elle prise pour arrêter son choix ? A la CFDT, ce n’est pas le chef qui décide. On en a beaucoup discuté entre nous. C’est un processus collectif, qui s’est passé de façon apaisée et sereine, très naturellement. Je crois qu’il est important que des femmes soient à la tête d’organisations syndicales. Ne craignez-vous pas que l’on vous reproche de quitter le navire en pleine bataille des retraites ? C’est tout l’inverse. Je pense que, le 21 juin, je laisserai une CFDT qui va bien. Elle compte 31 000 adhérents en plus depuis le début de l’année. Elle a créé plusieurs centaines de sections syndicales. Elle est la première organisation syndicale de ce pays. Elle est reconnue comme une organisation responsable, combative, constructive.J’ai conscience que c’est une période particulière. Mais qui vous dit que ça ne sera pas la même chose en octobre ? Ou en juin ? J’ai déjà repoussé d’un an, car c’était une période particulière. En réalité, je crains qu’on ne vive que des périodes particulières, que ce ne soit jamais le bon moment. C’est d’ailleurs souvent le prétexte invoqué par certains – des hommes, le plus souvent – pour se présenter comme indispensables. Je ne suis pas indispensable à la CFDT. Notre organisation saura affronter les moments à venir avec Marylise [Léon]. Ne pensez-vous pas que partir maintenant contribue à affaiblir le mouvement social au sein duquel vous occupez une position centrale ? Non, car le mouvement social est riche des travailleurs et des travailleuses qui se mobilisent. Je sais bien que j’ai joué un rôle dans la contestation de la retraite à 64 ans. Je n’en ai pas fini, d’ailleurs. Je vois aussi que, dans un monde un peu paumé, on a besoin